Tant d’informations, vraies ou fausses, ont été répandues à propos de la crise des migrants que les avis les plus contradictoires cohabitent et s’opposent suscitant autant l’empathie que le rejet. En 40 minutes, le Théâtre d’1 jour fait place nette pour une réflexion débarrassée de tous préjugés en abordant des exils puisés autant dans d’authentiques histoires familiales du XXe siècle que de réalités dramatiques immédiates.
Un début en forme de conte rappelle l’aventure du spectacle « La Volière de Dromesko » qui fit des tournées internationales dans les années 1990 avec un spectacle dans lequel des oiseaux avaient un rôle capital. La morale en est que des volatiles passent aisément des frontières, repartent et reviennent. C’est d’ailleurs le rappel sonore des bruits d’ailes d’un envol qui, symboliquement, clôture cette représentation.
Une autre aventure servira de toile de fond pour la suite, celle, narrée par Patrick Masset, d’une couple (ce pourrait être ses parents) qui part s’installer au Canada, sans doute vers 1950, afin de travailler. Pour échapper à des exploiteurs sans scrupules (cela ne date pas d’aujourd’hui), les époux filent vers Vancouver. De petits métiers en labeur plus élaborés, ils fondent une famille. Eux et les enfants paraissent dans ces vieux films super8 qui témoignent d’années heureuses que les rejetons devenus adultes regretteront une fois tout le monde revenu en Belgique. S’intercale aussi tel dialogue téléphonique démontrant que, en dépit d’apparences de sérénité, la personne restée à l’étranger sans les siens se retrouve dans une solitude insupportable.
D’autres démonstrations viendront s’intercaler sur un montage vidéo d’images d’archives: celle du musicien venu d’Irak et atterri à Liège qui finit par s’interroger sur la générosité paradoxale de l’accueil alors que la Fabrique Nationale d’Herstal exporte des armes dans les pays en conflits au Moyen Orient ; celle des chiffres statistiques des morts en mer sur rafiots de trafiquants d’êtres humains en Méditerranée depuis 2000 ; celle, mêlant dessin animé d’océan houleux et marionnette, pour rappeler Aylan, gamin kurde photographié décédé sur une plage turque par Nilufer Demir ; celle de la brève et bruyante intervention de douaniers durant la représentation… Une des séquences finales, inattendue, montre un Elvis Presley pas encore déchu, chantant « If I Can Dream » (Laissez mon rêve devenir réalité).
Derrière des épisodes relatés en langage simple, toute la complexité des problèmes soulevés par l’émigration sont abordés. La variété des formes utilisées et la fluidité de leur déroulement facilite la démonstration. Parole ou musique en direct, voix off ou bande son, films, ombres chinoises, effets optiques et modification de l’espace à travers des écrans de tulle, marionnette,… chaque trouvaille scénique contribue à l’efficacité d’un message certes militant mais formellement abouti. L’ensemble a été conçu pour être joué partout, surtout là où il n’y a pas de théâtre, dans le but de conscientiser un maximum de citoyens.
Source : www.ruedutheatre.eu Suivez-nous sur twitter : @ruedutheatre et facebook : facebook.com/ruedutheatre