Eden Teatro, salle mythique de Bologne où se faisait et se défaisait la fortune des artistes italiens de music-hall au début du vingtième siècle. Avec comme figure emblématique et vedette Raffaele Viviani (1888-1950), un napolitain pur jus, enfant de la balle qui connut la galère et les cachets minables des cabarets et salles de variétés de la péninsule avec une série de personnages inspirés de la vie populaire napolitaine. En passant, non sans mal, la rampe de L’Eden Teatro, Viviani conquiert la gloire et dans ses mémoires posthumes parues en 1977 évoque son passé et ses oeuvres d’auteur, metteur en scène, chanteur, acteur, contrebassiste à l’occasion.
Gommeuses excentriques
Alfredo Arias plonge avec délectation dans ce répertoire fait pour lui. Eden Teatro, le spectacle qu’il en tire à l’Athénée, se présente comme une revue de music-hall sans fil narratif avec une succession de numéros chantés et dansés entrecoupés de dialogues. Sur scène, la troupe d’une dizaine de comédiens, la plupart outrageusement travestis, du Teatro Stabile de Naples (l’un des rares théâtres nationaux italiens) et, dans la fosse, un trio de musiciens, font revivre, en dialecte napolitain surtitré (trop rapidement), toute la verve scabreuse du bateleur Viviani. Allusions grivoises, jeux de mots approximatifs, interpellations gouailleuses, algarades foudroyantes, chansons d’amour sucrées, gommeuses excentriques… les girls à la mode napolitaine ne se ménagent pas.
Costumes de Maurizio Milenetti, collaborateur de Fellini pour E la Nave va… et La Voce della luna, lumières criardes, décors à l’emporte-pièce… tout concourt à donner au spectacle un parfum délicieusement ringard, poignant de mélancolie, qui n’est pas sans rappeler le « Amarcord » de Fellini. Mais sans rien de subversif pour le fascisme qui non seulement laisse faire mais encourage ce genre de spectacles absolument inoffensifs pour lui.