Le pouvoir de persuasion de la télé n’est plus à démontrer. Les publicitaires en ont compris la puissance depuis belle lurette. Les gouvernements aussi. Et même après avoir visionné des reportages d’investigation qui démontent les mécanismes des manipulations de la réalité vécue sur le terrain, une bonne partie des citoyens resteront toujours sensibles aux émotions fugaces qui les bouleversent, tout comme les politiciens professionnels pousseront à faire passer des lois nouvelles sous le couvert d’urgences purement affectives.
Pour démontrer à quel point les élections sont faussées par les pressions faites sur les votants, une bonne idée de départ inspirée par le jeu vidéo « Fight Light ». Sur une scène qui ressemble à un ring de boxe, cinq candidats s’affronteront en sollicitant les voix des spectateurs munis de boitiers électroniques. Chacun défendra son programme électoral et les candidats seront éliminés les uns après les autres jusqu'à en arriver au seul vainqueur.
Les tests accomplis par les spectateurs laissent apparaître des chiffres statistiques intéressants. Ils indiquent combien de personnes sont dans la salle, leur répartition par sexe et par tranches d’âge. Ces résultats s’affichent sur un tableau électronique. De la même manière, seront comptabilisés des jugements portés sur le discours ou les attitudes des élus potentiels.
C’est probant tout en sachant que, comme pour n’importe quel sondage, la manière de formuler les questions induit en partie les réponses. Se pose aussi l’interrogation de savoir si les pourcentages annoncés ne sont pas truqués car il est déjà difficile de croire sans douter aucun des comédiens qui, visiblement, jouent.
Exiger d’eux qu’ils parlent le plus naturellement possible fausse le jeu : or, pour croire qu’il s’agit bien d’une véritable émission de télé réalité, il faut accepter la convention que le jeu théâtral imite des conduites liées aux rituels des émissions. D’emblée il y a dichotomie entre l’action d’interprétation des rôles et la présence réelle d’acteurs ayant une autre identité dans la vie réelle. Ce qui ne va pas sans un certain malaise.
La démonstration est évidente. Sa crédibilité l’est moins. En tout cas dans la version française de la pièce où le programme, contrairement aux variantes néerlandaise ou anglaise, indique entre parenthèses ‘improvisation’. Reste un outil attachant, susceptible de s’affiner lors des débats d’après spectacle.