Programmation du Théâtre de la Ville hors les murs, le portrait réalisé par le Festival d’Automne à Paris met en avant huit pièces qui jalonnent le parcours d’un auteur en train de s’inventer. Autant de spectacles qui, pour la plupart, vont tourner dans les salles parisiennes et dans plusieurs villes de banlieue en novembre et décembre. Comme « Gala », oeuvre emblématique et joyeuse réalisée en 2015 avec un groupe d’amateurs qui exploite la simplicité de la « danse domestique ». Ou « Cédric Andrieux » (2009), qui questionne la trajectoire du danseur éponyme du Ballet de l’Opéra de Lyon.
Recréée à l’Espace Cardin, la plus ancienne de ces pièces, celle qui porte son nom, « Jérôme Bel », datée de 1995, est aussi la plus radicale. Il s’agissait pour le chorégraphe alors inconnu de « subjectiver » son propos. Non sans humour. Et d’atteindre un « degré zéro » de la représentation chorégraphique, projet inspiré par la lecture de Roland Barthes. Avec des danseurs entièrement nus sur un plateau dépouillé à l’extrême, la « dramaturgie » se résume à trois éléments : la lumière (une ampoule portée par une interprète), la musique (exclusivement chantée en live) et les corps (qui s’auscultent, se mesurent, se frottent, laissent aller les fluides qui les traversent, y compris l’urine !).
Toujours à l’Espace Cardin, « Disabled Theater » (2012) avec la troupe du Theater Hora, constituée d’acteurs handicapés mentaux basés à Zurich, se propose d’explorer de nouveaux possibles théâtraux. Il s’agit de valoriser la situation de handicap par la mise en œuvre de son potentiel créatif. Le chorégraphe expérimente quant à lui un rapport autre à la direction d’acteurs avec une performance en partie hors de maîtrise.
Deux créations
Pas seulement rétrospectif, le portrait dressé par le Festival d’Automne est aussi l’occasion de deux créations. La première avec le Ballet de l’Opéra de Lyon pour lequel Jérôme Bel a conçu un programme associant deux chorégraphes de la modernité, William Forsythe et Trisha Brown, à une œuvre propre. Dans l’autre création prévue, « Un Spectacle en moins », Jérôme Bel se propose faire un spectacle le moins spectaculaire possible. Fruit de rencontres préalables avec le public de la Commune, CDN d’Aubervilliers, il s’agit de répondre à ce projet symptomatique du chorégraphe : « chercher où je n’y arrive pas ».